Plus de 50 années de progrès en mathématiques, en science des matériaux et en informatique ont fait passer l’informatique quantique de la théorie à la réalité. Aujourd’hui, c’est une technologie de plus en plus accessible.
Qu’est-ce qu’un ordinateur quantique
Contrairement aux ordinateurs classiques, un calculateur quantique s’appuie sur les propriétés quantiques de la matière, telle que la superposition et l’intrication pour effectuer des opérations sur des données.
Comment fonctionne-t-il
L’ordinateur tel que nous le connaissons aujourd’hui travaille sur des données binaires composées de bits valant 0 ou 1. L’avantage du binaire est qu’il est facile à représenter d’un point de vue électrique : Si le courant passe c’est un 1, sinon c’est un 0. Le microprocesseur des ordinateurs classiques est un ensemble de transistors câblés entre eux et capables de réaliser des opérations logiques et des millions de bits travaillent ensemble pour traiter et afficher des informations.
L’ordinateur quantique utilise quant à lui des bits quantiques que l’on appelle q-bit et qui obéissent aux lois de la mécanique quantique. Pour manipuler des informations, ils exploitent différents phénomènes physiques superposition, enchevêtrement et interférence.
D’un point de vue matériel, il faut un système capable d’être dans 2 états simultanément et suffisamment petit pour obéir aux lois de la mécanique quantique. Pour y parvenir, on peut par exemple utiliser le spin d’un électron ou d’un noyau atomique, la polarisation d’un photon ou encore certain circuit supraconducteurs.
La superposition quantique
Dans l’infiniment petit, la matière se comporte différemment. Par exemple, une particule de l’infiniment petit peut se trouver dans un état indéterminé avant toute mesure. De même toutes les caractéristiques des particules peuvent être sujettes à cette indétermination : par exemple, la position d’une particule quantique est incertaine : elle n’est ni à un point A ni un point B, mais a seulement une probabilité d’être à un endroit lors d’une mesure.
L’intrication quantique ou enchevêtrement
L’intrication est un phénomène quantique contre-intuitif qui décrit un comportement que nous ne voyons jamais dans le monde classique. C’est un phénomène dans lequel deux particules (ou groupes de particules) forment un système lié et présentent des états quantiques dépendant l’un de l’autre quelle que soit la distance qui les sépare. Un tel état est dit « intriqué » ou « enchevêtré » parce qu’il existe des corrélations entre les propriétés physiques observées de ces particules distinctes. Il faut ainsi considérer des objets intriqués comme un système unique.
Pourquoi nous avons besoin de l’informatique quantique
Nous faisons chaque jour l’expérience des avantages de l’informatique classique. Les ordinateurs actuels nous aident et nous divertissent, nous connectent avec des gens du monde entier et nous permettent de traiter d’énormes quantités de données pour résoudre des problèmes et gérer des systèmes complexes.
Le physicien américain Richard Feynman a été un des premiers à comprendre au début des années 1980 que l’on pouvait mettre à profit les lois de la mécanique quantique aux seins de système quantiques artificiels. Il se trouve en effet, notamment dans le domaine de la chimie quantique et de la physique du solide, que la simulation est rapidement limitée par le volume de calculs nécessaires. Mais comme l’explique Feynman dans son célèbre ouvrage « lectures on computation », il est possible de créer des calculateurs qui permettent de contourner l’obstacle.
Pour résoudre des problèmes dépassant une certaine taille et une très grande complexité, nous avons besoin d’une informatique dont la puissance de calcul évolue également de manière exponentielle à mesure que la taille du système augmente.
Avec un ordinateur normal, un registre composé d’une association de 4 bits permet d’obtenir 16 configurations distinctes :
0000 0001 0010 0100
1000 0011 1010 1001
0110 1010 1100 1011
1011 1101 1110 1111
Dans un registre quantique composé de 4 q-bits, les q-bits peuvent être dans une superposition de ces 16 états. De manière générale, un registre de n q-bits permet d’aller 2n fois plus vite qu’un système binaire classique. L’ordinateur quantique va donc plus vite, il accélère certains types de calculs.
Ceci est rendu possible grâce à des algorithmes tels que celui de Griver qui permet de réduire le nombre d’étapes nécessaires à la résolution d’un certain type de problème. De même la factorisation de nombres entiers, qui permet de trouver leur composition en un produit de nombres premiers, peut être accélérée grâce à l’informatique quantique.
Avec un système classique le temps de calcul augmente exponentiellement avec le nombre de chiffres du nombre à factoriser. Avec un système quantique, il augmente de façon polynomiale, en d’autres termes, le calcul est beaucoup plus rapide.
Ceci est très utile pour la cryptographie, avec l’algorithme RSA. L’informatique quantique permet donc de casser des clés de cryptages beaucoup plus rapidement qu’avec un ordinateur classique. On utilise pour cela l’algorithme de Peter Shor qui offre des résultats exponentiellement meilleur que ce que l’on peut obtenir avec un ordinateur classiques.
Les ordinateurs quantiques pourraient un jour offrir des percées dans de nombreuses disciplines, notamment la découverte de matériaux et de médicaments, l’optimisation de systèmes complexes et l’intelligence artificielle. Mais pour réaliser ces avancées et rendre les ordinateurs quantiques facilement utilisables et accessibles il faut réinventer le traitement de l’information et les machines qui s’en chargent.
Quels sont les champs d’applications
La recherche, tant théorique que pratique, se poursuit à un rythme effréné, et de nombreux organismes de financement nationaux et militaires soutiennent la recherche en informatique quantique pour développer des ordinateurs quantiques à des fins de sécurité civile et nationale, comme la cryptanalyse.
La NSA a financé un programme de recherche intitulé « Penetrating hard targets » avec un projet « Owning the net » dont l’objectif est de pouvoir casser n’importe que clé. Celles-ci servent à protéger des pages Web sécurisées, des courriels chiffrés et de nombreux autres types de données. Décrypter les échanges de données aurait des conséquences importantes pour la sécurité et la confidentialité des échanges électroniques. Le seul moyen d’accroître la sécurité d’un algorithme tel que RSA serait d’augmenter la taille de la clé et d’espérer qu’un adversaire ne dispose pas des ressources nécessaires pour créer et utiliser un ordinateur quantique suffisamment puissant.
Les physiciens savent déjà faire quelques ordinateurs quantiques, mais ceux-ci sont très élémentaires et limités à la résolution de problèmes bien particuliers. On est loin d’une machine de Turing universelle et capable d’effectuer n’importe quel algorithme.
En 2011 le premier ordinateur quantique fut commercialisé par la société canadienne D Wave. Les capacités de cet ordinateur furent très critiquée par certains spécialistes qui ont même remis en cause le faut qu’il soit quantique.
Pour lutter contre les problèmes de décohérence des systèmes basés sur des jonctions Josephson, les puces telles que la D-Wave Two doit fonctionner à une température de 20 MK environ, ce qui est très proche du zéro absolu.
Depuis de nombreuses sociétés se sont lancées dans la fabrication de tels ordinateurs. On y trouve des sociétés comme IBM, Microsoft et Google.
Quelles sont ses limites
L’ordinateur quantique ne permet pas de tout faire et ne peut produire qu’un résultat à la fois. Ceci est à la réduction du paquet d’onde, un concept fondamental de la mécanique quantique selon lequel, après une mesure, un système physique voit son état entièrement réduit à celui qui a été mesuré. Auparavant, cet état était défini par l’équation dite de Schrödinger qui ne permet de le représenter que de façon probabiliste. Ainsi la particule ne peut se voir assigner avant mesure une position précise dans l’espace et le temps. La seule chose que l’on peut faire est de la mesurer et de la réduire à un seul de ses composantes.
Les ordinateurs et calculateurs quantiques sont confrontés au problème de la décohérence quantique, l’influence des perturbations de l’environnement qui dégrade d’autant plus rapidement un calcul quantique qu’il repose sur un nombre de plus en plus élevé de q-bits.
Plusieurs voies sont explorées pour tenter de contourner l’obstacle de la décohérence et permettre la réalisation pratique de calculateurs quantiques. Il existe essentiellement deux approches permettant de fabriquer des q-bits :
- les circuits solides, comme des circuits supraconducteurs ou des boîtes quantiques ;
- des systèmes comme des ions piégés, les centres colorés du diamant, etc.
Les restrictions sur ce qu’il est mathématiquement possible de programmer sur un ordinateur quantique resteront valables même si les physiciens viennent à bout du problème de la décohérence.
Dans l’état actuel de nos connaissances, pour d’autres problèmes tels que le jeu d’échecs, la planification des vols aériens ou la démonstration automatisée de théorèmes mathématiques, il semble que les ordinateurs quantiques seront soumis dans une large mesure aux mêmes limitations algorithmiques que les ordinateurs d’aujourd’hui.
Différences entre ordinateur et calculateur
Contrairement à l’ordinateur quantique, le calculateur quantique ne peut exécuter qu’un seul algorithme ou pour le moins, une classe d’algorithme. On ne peut le programmer.
Orientations techniques possibles
Concernant l’ordinateur quantique du futur, plusieurs orientations sont envisagées dans la littérature spécialisées. L’une des pistes consiste à le construire sur le modèle de l’ordinateur « classique » puis sous-traiter une partie des tâches au calculateur quantique.
Apparemment ces ordinateurs devraient se développer aux alentours de 2025. Ils vont probablement contribuer à une accélération de la recherche scientifique.
J’ai du mal à leur trouver une utilité en tant que telle au niveau des particuliers que nous sommes
Il est fort probable que l’informatique vienne compléter l’informatique actuelle sans pour autant la remplacer complètement. Elle se matérialisera peut être sous forme de cartes d’extension enrichissant les systèmes actuels. Mais seul l’avenir nous le dira